Une cadre dirigeante prépare depuis
plus d'une semaine une
réunion de travail destinée à préparer un futur conseil
d'administration. Elle s'y présente avec les nombreux dossiers qui
doivent être discutés, mais son employeur, au lieu d'aborder les
sujets prévus, lui remet une lettre de convocation à un entretien
préalable au licenciement.
S'en
suit un échange d'une heure, au cours duquel l'employeur détaille,
sur un ton courtois, à une salariée stupéfaite et « sonnée »
les motifs de son futur licenciement, remettant en cause ses qualités
professionnelles mais aussi personnelles (« Vous
ne savez pas communiquer avec les autres. Vous n'écoutez pas. Vous
ne recevez pas les messages. C'est impossible de travailler avec
vous »...).
Au sortir de cet
entretien, la salariée s'effondre en larmes. Son médecin constate
un
état de détresse important. S'en suivront un long arrêt de travail
et un lourd suivi médical.
La CPAM refuse de
prendre en charge cet accident du travail, au motif (classique en la
matière) que son enquête montre que l'entretien s'est déroulé
calmement et sur un ton courtois, ce qui impliquerait l'absence de
choc psychologique, et donc d'accident du travail.
Le Tribunal de
Grande Instance de NANTERRE va suivre notre argumentaire, et
reconnaître qu'il s'agit d'un accident du travail.
Il souligne
que : « Les troubles psychologiques générés
par un choc émotionnel peuvent revêtir le caractère d'un accident
du travail dès lors qu'il est établi un lien de causalité entre le
traumatisme allégué s'étant produit à une date certaine et le
fait accidentel ».
La
présomption d'imputabilité de l'article L.411-1 du Code de la
Sécurité Sociale trouve à s'appliquer pour un traumatisme
psychologique survenu aux temps et lieu du travail, ce qui
était bien le cas en l'espèce.
C'est souvent sur
la notion de « choc » émotionnel que le combat avec la
CPAM est âpre. Tous les chocs de ce type n'arrivent pas lors d'une
violente altercation devant témoins.
Que faire quand
tout se passe au cours d'un entretien dans un bureau fermé ?
La particularité
du présent dossier est
la volonté de l'employeur de créer
un effet de surprise,
en modifiant sans prévenir l'objet d'une réunion prévue de longue
date.
Il
a délibérément choisi de prendre notre cliente au dépourvu,
la laissant s'investir durant plusieurs jours dans un travail
considérable, et lui laissant croire qu'il la conviait à une
réunion de travail, alors même qu’il avait préparé une
procédure de licenciement.
La
souffrance de la victime a été encore aggravée par le fait que
l'employeur a cru devoir prolonger leur entretien durant une heure.
Les
conditions de l'existence d'un accident du travail sont donc
remplies :
- un événement soudain (qui plus est survenu aux temps et au lieu du travail) ;
- une lésion médicalement constatée ;
- un lien démontré entre l'accident et cette lésion.