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mardi 30 décembre 2014

Revue des décisions 2014 du cabinet / Licenciement pour inaptitude : l'employeur doit prouver une recherche exhaustive au sein du groupe auquel il appartient

Souffrant d'une maladie professionnelle (un asthme) un plombier a airé déclaré par le médecin du travail inapte à son poste. Il pourrait exercer un travail n'exposant pas aux vapeurs d'enrobés et en dehors de tout milieu empoussiéré.

Bien que faisant partie d'un groupe d'envergure nationale, son employeur, la société SCHVAB, ne lui proposait aucun poste de reclassement, et le licenciait pour inaptitude.

Ce client est venu nous consulter au stade de l'appel, après avoir été débouté de ses demandes par le Conseil de Prud'hommes.

Devant la Cour d'Appel de Versailles, notre travail s'est attaché à étudier la recherche de reclassement de l'employeur, pour démontrer à quel point elle présentait des lacunes.

Comme c'est souvent le cas dans cette matière, la société SCHVAB produisait en effet un e-mail collectif envoyé à de très nombreuses sociétés du groupe. En détaillant ce volumineux e-mail, et les réponses qui lui ont été apportées, on découvrait que plusieurs filiales n'avaient pas été contactées.

Qui plus est, la société SCHVAB fait partie du groupe FIRALP, qui employait à l'époque 2500 salariés, pour un chiffre d'affaire de 290 millions d'euros. En prenant le temps de lire les registres du personnel de toutes les filiales, nous découvrions de nombreux poste qui auraient pu être proposés à notre client.

Allant dans ce sens, la Cour d'Appel de Versailles, par un arrêt du 13 novembre 2014, jugeait que le licenciement n'avait pas de cause réelle et sérieuse :

« Il faut rappeler en premier lieu que le groupe FIRALP auquel appartient la SAS Schvab comprenait au moment de la recherche de classement de M. Driss L. 2400 personnes, ainsi que le mentionne la plaquette datée du 4 août 2011 produite par la société qu’elle avait enregistré en 2010 un chiffre d’affaires de 310 millions d’euros et était alors constituée de 17 filiales.

La société Chazal, spécialisée dans les espaces verts, y est expressément mentionnée avec ses coordonnées précises au titre de ces 17 filiales. La revue « FIRALP Info » éditée en octobre 2011 et produite par le salarié (sa pièce 23) mentionne l’arrivée de 16 nouveaux embauchés, dont un ouvrier paysagiste au sein de la société Chazal. La consultation du site internet de cette société confirme qu’elle en fait partie encore aujourd’hui. La SAS Schvab ne peut donc venir soutenir qu’il ne s’agissait que d’un partenaire de la société FIRALP, sans en justifier de façon certaine. En effet, le procès-verbal des décisions de l’associée unique de la société Chazal, la société CAP VERT SAS, produit au débat, daté du 23 avril 2008, est très antérieur à la période du licenciement de M. L., rien ne démontrant qu’en 2011, cette société se trouvait encore être seule détentrice des actions de la société Chazal.

Par ailleurs, s’il ne peut être contesté que la SAS Schvab a adressé un courriel très précis de recherche de reclassement à la plupart des sociétés et agences du groupe FIRALP dont elle fait partie, il s’avère cependant qu’elle ne s’explique pas sur l’absence d’envoi de ce message aux sociétés CSE, BARDIN et RVS, filiales du groupe, qui pourtant traitent de réseaux humides comme elle.

Enfin, même si certains postes ne sont pas adaptés aux compétences du salarié (électricien, ou aide-électricien, chef d’équipe, magasinier, mécanicien, agent technique), le registre du personnel de la société Sobeca mentionne l’embauche en intérim le 7 novembre 2011 d’un agent d’entretien et de gardiennage par l’établissement de Bordeaux et celle, en intérim également, d’un coursier laveur à l’établissement d’Anse Mécanique le 30 janvier 2012. La SAS Schvab ne démontre pas en quoi ces deux postes n’auraient pas pu être proposés à M. Driss L..

Faute par la SAS Schvab d’avoir complètement rempli son obligation de reclassement à l’égard du salarié inapte, le licenciement pour inaptitude de M. Driss L. apparaît ainsi dénué de cause réelle et sérieuse. »


Il y a lieu de saluer le fait que la Cour d'Appel de Versailles ait pris la peine de consulter le site Internet de la société pour vérifier par elle-même certains dires de l'employeur, et constater qu'ils n'étaient pas exacts.

Pour obtenir la copie de cette décision

lundi 29 décembre 2014

Revue des décisions 2014 du cabinet / Un salarié qui refuse le reclassement qui lui est proposé ne peut pas être licencié pour abandon de poste


Au bout de 17 ans de travail au société SIMONE TEINTURERIE DE LUXE, une repasseuse présente une maladie professionnelle (limitation des mouvements de l'épaule droite).

Le médecin du travail la déclare inapte à son poste de repasseuse, mais apte à tout autre poste dans l'entreprise, sans utilisation du bras droit et de la main droite de façon répétée et prolongée.

Son employeur lui propose successivement deux postes de reclassement, que la salariée refuse, car ils ne sont pas conformes aux préconisations du médecin du travail.

Au lieu d'envisager un licenciement pour inaptitude, la société SIMONE TEINTURERIE DE LUXE choisit de licencier cette fidèle salariée pour faute grave (abandon de poste) !!

Ainsi, non content de la licencier, il la prive de l'ensemble des indemnités légales auxquelles elle a droit (étant rappelé qu'elle a 17 ans d'ancienneté dans l'entreprise).

Devant la Cour d'Appel de PARIS, nous avons rappelé la jurisprudence de la Cour de Cassation : « ne peut constituer en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement le refus par le salarié du poste de reclassement proposé par l'employeur en application de l'article L. 1226-2 du code du travail lorsque la proposition de reclassement emporte modification du contrat de travail ou des conditions de travail ; qu'il appartient à l'employeur de tirer les conséquences du refus du salarié soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement de l'intéressé aux motifs de l'inaptitude et de l'impossibilité du reclassement » (Cass. Soc. 19 juin 2013, pourvoi n°12-12018).

Et surtout : « une faute grave ne peut se déduire du seul refus par un salarié du poste de reclassement proposé par l'employeur, et ce, même si ce reclassement n'entraîne aucune modification des conditions de travail » (Cass. Soc. 20 janvier 2010, pourvoi n°08-45017).

Suivant cette jurisprudence, la Cour d'Appel a donné gain de cause à notre cliente :

« Aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, la salariée est licenciée pour abandon de poste que l'employeur assimile à une faute grave au motif qu'elle a refusé d'occuper le poste qu'il avait spécialement défini en fonction de son handicap ;

Or, c'est abusivement que l'employeur fait grief à la salariée de refuser le poste proposé alors qu'il ne justifie pas que le médecin du travail avait déclaré ce poste compatible avec les capacités de la salariée ; En tout état de cause le refus du salarié d'occuper le poste qu'il considère inadapté à son handicap et aux préconisations de la médecine du travail n'est pas constitutif d'une faute grave de sorte que le licenciement fondé sur ce seul grief est dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors qu'il n'est pas établi par la SA SIMONE TEINTURERIE DE LUXE que devant le refus de la salariée il avait consulté le médecin du travail et que son avis avait été conforme aux restrictions de l'avais d'inaptitude ;

Outre le fait que le licenciement de Madame Djeida X... se trouve en conséquence de ce qui précède dépourvu de cause réelle et sérieuse, il est illicite faute par la SA SIMONE TEINTURERIE DE LUXE de justifier avoir consulté les délégués du personnel sur les postes de reclassement proposés et avoir recueilli leur avis en conformité avec l'obligation résultant de l'article L. 1226-10 du Code du Travail ».

Revue des décisions 2014 du cabinet / Licenciement pour inaptitude : recherche de reclassement fictive et non-respect de l'obligation de consulter les délégués du personnel

Suite à un accident du travail, une hôtesse caissière pour la société CARRE DES CHAMPS ELYSEES (restaurant Ledoyen) est déclarée inapte définitivement à son travail.

Elle est licenciée pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.

Devant le Conseil de Prud’hommes de PARIS, nous faisions notamment valoir :


1/ En application des articles L.1226-10 et du L.1226-12 du Code du Travail l'employeur était tenu de lui proposer un autre emploi aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

La Cour de Cassation considère qu’il appartient à l’employeur qui licencie un salarié pour inaptitude à son poste de travail de prouver l’impossibilité de reclassement, y compris au sein du groupe auquel l'entreprise appartient.

Le Conseil de Prud'hommes a jugé à juste titre que l'employeur ne démontrait pas que les postes proposés à la salariée étaient conformes aux préconisations du médecin du travail, ni même qu'elle les avait proposés effectivement.


2/ L’employeur a l’obligation de prendre avis auprès des délégués du personnel sur les possibilités de reclassement du salarié.

Or la société CARRÉ DES CHAMPS-ÉLYSÉES produisait un procès-verbal de consultation des délégués du personnel rédigé en ces termes :

« 1. Reclassement de Mme B. :
Les membres des R.P ont pris connaissance du dossier ».

Reprenant notre argumentaire, le Conseil de Prud'hommes a jugé que «  le procès-verbal de cette réunion laisse apparaître qu'aucun avis n'a été rendu puisqu'au paragraphe : reclassement de Mme B. figures seulement la phrase suivante : « les membres des RP ont pris connaissance du dossier », sans autre précision (…). C'est donc à juste titre que Madame B. soutient que son licenciement est intervenu en méconnaissance de la formalité substantielle que constitue la consultation des délégués du personnel, ce qui lui ouvre droit à l'indemnité prévue à l'article L.1226-15 alinéa 3 du code du travail ».

Pour commander une copie de cette décision